Madame, Monsieur,
Je m‘appelle Anthony et je suis sapeur-pompier depuis 25 ans.
Je voudrais vous parler aujourd’hui d’un drame qui se passe sous nos yeux mais dont les médias ne parlent pas.
Vous avez peut-être déjà vu sur Internet : « un pompier agressé dans telle ville » ou encore « des tirs de mortier ont été lancés sur les pompiers ».
Mais peu de gens savent à quel point notre quotidien est devenu un enfer. Je vais vous le raconter.
Je suis sapeur-pompier dans une grande ville française.
Et voici une de mes dernières journées de travail, au hasard.
Nous sommes un samedi après-midi, en plein centre-ville.
Plusieurs manifestations se rejoignent sur une place très centrale et il y a beaucoup de monde.
Avec mes collègues pompiers, nous sommes appelés parce qu’une jeune fille a été agressée.
Nous la retrouvons. Elle est visiblement sous le choc et nous décidons de l’emmener à l’hôpital.
Mais au moment de partir, des témoins viennent en courant : un homme s’est fait poignarder tout près d’ici.
Je décide d’y aller seul avec un sac de premiers secours et une radio.
Il y a de la tension dans la rue. L’homme blessé est allongé sous un abri-bus. Il est touché et il est même littéralement en train de se vider de son sang.
Je cours vers lui et j’appose immédiatement mes mains aux zones touchées pour stopper l’hémorragie. Je me mets dos à l’abribus, par réflexe.
Là, les choses s’emballent. Je ne l’avais pas vu, mais l’agresseur est là, tout près. Il m’a vu et il vient vers moi en me menaçant. Je ne vois pas ses mains, peut-être a-t-il un couteau.
Des insultes, des menaces de mort.
« Laisse-le crever ou je vous fume tous les deux »
Moi, je suis un pompier calme et, comme j’ai l’habitude de le faire, je parlemente avec lui. En gardant une main sur l’hémorragie, je tente de calmer le jeu.
Après quelques instants de négociation, l’agresseur s’éloigne et je peux tenter de soigner le blessé.
C’est alors que, sortis de nulle part, trois jeunes passent devant moi sur des trottinettes électriques, avec de la musique, et ils me menacent de mort.
C’est de l’agressivité gratuite, sans la moindre raison.
Après m’avoir insulté copieusement, ils repartent tranquillement. Et moi je reste là, seul et dépité par tant de mépris, sans même avoir pu réagir.
Mais pour être honnête, je suis habitué. Et surtout, j’ai un homme à sauver.
La semaine dernière, un de mes collègues m’a raconté, d’un air blasé, que dans son équipe, le camion de pompiers a été volé pendant une intervention.
C’est déjà la deuxième fois cette année dans sa caserne.
En début d’année, un collègue en service s’est, lui, pris un violent coup de hache qui lui a ouvert le crâne.
Entré en contact avec le sang de son agresseur, il a vécu des jours d’angoisse en attendant d’avoir les résultats de son test de SIDA.
Et il y a pire.
L’année dernière, au 14 juillet, on a même tendu un guet-apens à des collègues de l’Essonne. Des individus avaient mis le feu à une poubelle pour appeler les pompiers et leur ont tiré dessus à la carabine.
Toujours sans la moindre raison, à part le goût de la violence sauvage.
Les histoires que je vous raconte, chaque pompier en a des dizaines.
Personnellement, je ne vis pas une seule journée sans subir une agression verbale.
Pas une seule.
Un rapport du Sénat de 2019 parle d’agressions « de plus en plus fréquentes et de plus en plus graves ».
Il dit même « Il n’est plus uniquement question d’outrages ou d’agressions, mais de véritables guet-apens : jets de pierre, de cocktails Molotov, agressions à l’arme blanche ou encore attaques et destruction de véhicules ».
En 10 ans, le nombre d’agressions de pompiers a augmenté de 213% ! C’est une agression toutes les trois heures désormais.
Et encore, nous sommes beaucoup à ne même plus porter plainte !
De toutes façons, je sais très bien que les auteurs seront relâchés par la Justice dans les 2 heures… et si je porte plainte, les voyous auront mon nom et mon prénom. C’est alors ma famille qui serait en danger.
Moi, je me suis engagé pour aider mes concitoyens, pas pour me prendre des boules de pétanque ou des machines à laver du haut des immeubles…
Si je m’adresse à vous aujourd’hui, c’est pour vous demander d’agir.
Si vous et moi ne faisons rien, il n’y aura bientôt plus assez de pompiers pour vous secourir ;
Plusieurs de mes collègues sont partis, soit à l’étranger, soit dans d’autres métiers.
Et cela fait une dizaine d’années que nos services ont de sérieuses difficultés de recrutement.
Et là, les choses s’accélèrent, les nouvelles recrues sont moins nombreuses chaque année.
Au moment où je vous parle, il y a déjà beaucoup de casernes qui commencent à être en sous-effectifs…
Moins de pompiers disponibles, cela veut dire que les pompiers devront limiter les interventions qu’ils font. Ils seront plus lents et plus surmenés.
Heureusement, il y a une solution simple pour protéger les pompiers de ces agressions.
La solution, c’est la Justice. Si la Justice faisait son travail, comme nous faisons notre travail, les agresseurs seraient découragés d’agir et il n’y aurait pas autant d’agressions.
Si les agresseurs de pompiers agissent, c’est parce qu’ils savent qu’il n’y a aucune conséquence à leurs actes.
Quand un jeune agresse un pompier, comme quand il agresse une personne dans la rue, il doit être puni.
Sans cette punition, ce jeune n’a aucun moyen de comprendre que son acte est inadmissible. C’est la porte ouverte à l’impunité et à une spirale de violence.
Cette spirale de violence, je la côtoie tous les jours au travail.
Nos agresseurs sont tous des multirécidivistes qui n’ont jamais été confrontés à un mur.
Cela ne concerne d’ailleurs pas que les pompiers, mais aussi tous les Français.
Les délinquants en France sont souvent mieux traités que les victimes !
Voilà pourquoi j’ai décidé d’agir.
Après ma dernière agression, j’ai contacté le syndicat Sud, qui m’a mis en contact avec l’Institut pour la Justice.
L’Institut pour la Justice, c’est une association indépendante qui rassemble des juristes, des victimes et des citoyens qui œuvrent à réformer la Justice en France.
Depuis près de 14 ans, cet institut a déposé des dizaines d’amendements et de propositions de loi pour améliorer le système judiciaire : par exemple pour la défense des petits propriétaires contre les squats, la prolongation des délais des prescription pour les crimes, ou encore la suppression des réductions de peine pour les terroristes.
Il est aussi en contact avec des dizaines de parlementaires, d’avocats, de magistrats et publie chaque année la revue Française de Criminologie et de Droit Pénal.
Et aujourd’hui, l’Institut pour la Justice lance un appel à tous les candidats pour demander 6 mesures claires de protection des pompiers et des citoyens.
Vous pouvez, vous aussi, aider les sapeur-pompiers en signant
le SOS des pompiers, en cliquant sur le bouton rouge sous cette vidéo.
Les insultes contre nous, contre nos familles, les humiliations publiques et l’hostilité permanente sont le quotidien de la quasi-totalité des pompiers de France.
Si la situation continue d’empirer, il y aura de moins en moins de pompiers, de moins en moins de volontaires et c’est vous directement qui serez pénalisé par la lenteur des services.
C’est peut-être des vies qui ne seront pas sauvées. C’est peut-être un parent, un ami, un enfant qui ne sera pas secouru à temps.
Voilà pourquoi il faut agir maintenant, en nombre. C’est très important.
Nous avons besoin du soutien de centaines de milliers de citoyens comme vous. Si nous sommes suffisamment nombreux, alors seulement les politiques nous écouteront. Et alors, nous pourrons faire changer les choses.
Parmi nos demandes, nous avons inséré par exemple l’anonymat des dépôts de plaintes pour les pompiers en service. Cette mesure permettrait notamment aux pompiers volontaires des petites villes de déposer plainte contre leurs agresseurs, sans avoir peur de représailles.
A l’initiative de l’Institut pour la Justice, cette mesure a été votée à l’unanimité en janvier 2021 au Sénat.
Mais la suite du processus a été stoppée car les députés n’ont jamais daigné la voter.
Avec votre soutien, il est certain que cette mesure serait votée dans les prochains jours. J’espère donc que vous signerez cet appel et que vous le transfèrerez à tout votre entourage.
Nous demandons :
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L’anonymat des dépôts de plaintes par les sapeurs-pompiers agressés en service. 80% des sapeurs-pompiers sont des pompiers volontaires dans des petites villes et ils ne déposent pas plainte car leurs agresseurs peuvent les retrouver avec leurs noms et leurs prénoms.
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Le parquet doit poursuivre systématiquement les agresseurs de pompiers. C’est intolérable que la majorité des plaintes soient « classées sans suite ».
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Les peines planchers doivent être rétablies pour tous les récidivistes et pour les agresseurs de pompiers ou de policiers.
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L’aménagement des peines doit être supprimé. Aujourd’hui, les peines prononcées par les juges sont divisées par deux ou par trois par rapport à la condamnation !
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Il faut des tribunaux dédiés et rapides pour les agressions envers ceux qui se dévouent pour vous, les citoyens : pompiers, enseignants, policiers.
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Il faut enfin rétablir la peine de perpétuité pour les pires criminels multirécidivistes. La perpétuité n’existe plus dans notre pays et il faut protéger les futures victimes. Selon un récent sondage, ce sont même 92% des Français qui sont en faveur de cette mesure, mais les politiques ne l’ont toujours pas instaurée.
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Si la Justice était revalorisée, croyez-moi, ce serait un changement considérable pour la vie des sapeur-pompiers et pour vous, les citoyens.
Ce ne sont plus nous, les pompiers, qui aurions peur, mais ce sont eux, les agresseurs, qui auraient peur.
Aujourd’hui, cette peur doit changer de camp et grâce à vous, ce sera peut-être bientôt le cas.
De notre côté, nous mobilisons l’ensemble de nos forces pour faire entendre cet appel au plus grand nombre.
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Nous contactons les médias et préparons des articles et tribunes. |
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Nous finançons une communication à des centaines de milliers de personnes. |
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Nous préparons un travail de fond précis en soutien à chacune de nos propositions. |
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Nous organisons des rencontres avec des députés, des parlementaires et tous les candidats à l’élection présidentielle. |
Si nous voulons peser sur l’élection présidentielle, nous n’avons pas beaucoup de temps, il est impératif que vous m’aidiez maintenant.
Au nom de tous mes collègues sapeurs-pompiers de France, je vous dis un immense merci et peut-être à bientôt sur une intervention.
Anthony